Prodajem, prodajem
Sortis du paradis Slovène, nous voilà tout guillerets pour affronter un pays qui nous semble à 3 poils près similaire avant d’y rentrer les orteils. D’autant plus optimistes que le stop en Slovénie depuis Grosupjle avait cette fois pris 15 minutes, le temps que Ronk, nous jette à 40 bornes de la frontière Croate.
Premier contact avec une Croate : la douanière, qui riait à l’énoncé du parcours réalisé et prévu. Oui, on a pas encore les mollets d’Indurain, mais ça vient. Zagreb étant assez proche de la frontière, on décide de camper un peu avant et on repère un joli petit chemin paraissant propice à l’installation d’un campement de fortune. Propice sera l’endroit, dur sera la montée : une pente qui grimpe à parfois 40% nous oblige à pousser nos charrettes à pieds. Au final, superbe vue sur la région depuis notre emplacement où un local vient nous expliquer qu’on risque d’avoir le sommeil un peu perturbés par des groupes à la recherche de discretion.
Le lendemain, la descente est facile, on rencontre Hroye, qui nous emmène jusqu’à une source d’eau naturelle à 2 km qui en feront 8 mais peu importe. Ce pays débute bien. Puis nous entrons dans Zagreb où se déroule un festival d’artistes de rue. Nous discutons avec deux jolies guides des opportunités de la ville et du pays mais nous comprenons rapidement que nos pouces risquent de se tourner autour pendant la traversée. Il faudra donc s’organiser une fuite à l’Est plus rapidement. On plie les Harley, on s’essaye au stop sur une 3 voies en sortie de ville : bide total. Tant pis, nous campons en banlieue (y a pas de wesh wesh là-bas!) et direction Kutina, la prochaine « ville » pour une nouvelle tentative.
Deux jours plus tard, 120km, un détour de 30 km gratos dans une forêt pétrolifère sans issue, une route bordée de maisons qui manquent d’enduit ou en bois de 50 ans que les termites font tenir debout et des petites pancartes PRODAJEM partout pour indiquer qu’ils vendent 3 poules et 4 cerises sur le palier, nous arrivons à l’entrée d’autoroute.
La police est là, nous cherchons un coin d’ombre pour becter tranquille et un espèce de parc clos semble bien ombragé mais aussi… bien clos. Les jeunes derrière commencent à nous parler : c’est un camp de réfugiés et l’un deux nous invite à se poser contre le grillage. Chemin faisant, la police arrive, repérant les dangereux trafiquants que nous sommes. « Speak english? » « NO. DOKUMENTS! » Et là c’est l’affaire du siècle croate, mobilisation de la brigade anti-terroristes, contrôle interminable des passeports, appelle à l’aide d’une interprète. Bref, les experts Croatie sont déployés et nous indiquent d’aller siffler là-haut sur la colline au bled d’après. Bon OK, on se casse vite fait alors qu’ils enfilent les gants en latex à la recherche de poudre dans les environs… Paranoïa quand tu nous tiens…
En cours de route, on trouve un lac pour se baigner et se laver puis s’en suivront 2 jours de vélo, des entrées d’autoroute décevantes et donc finalement un aller simple Zagreb-Slavonski Brod de 250 bornes où les PRODAJEM seront encore légion.
Quelques villages gardent des traces de la guerre assez marquées : des impacts de balle sur les maisons quand elles sont encore en état, des lieux laissées à l’abandon. Murani est le lieu qui glace le plus le sang.
Après un passage éclair au pays des zombies (cf. article sur la Bosnie), le stop est tout aussi tonitruant sur place. Deux heures d’essai, la rencontre d’un anglais qui nous conseille le train à 10€ pour Belgrade et deux gitans qui tentent de nous soutirer quelques écus pour nous emmener d’après eux à Belgrade. Ca sentait le caca tout frais, donc en route pour le train qui mettra 4h pour faire les 150km…
En rentrant en Croatie, on ressent tout de suite la différence avec la fin de la Slovénie qui semble assez riche et plus on s’enfonce dans ce pays, plus on comprend que ça ira crescendo : Les Croates ont les poules que les Slovènes mangent et que les Roumains volent. Mais ça, tout le monde le savait déjà.