Dans le désert, la tête à l’envers
Afin de ne pas chambouler trop vite nos habitudes en arrivant sur la très civilisée terre Australienne, nous nous offrons une dernière nuit de camping improvisée dans le hall de l’aéroport, l’occasion d’apprendre par le biais du technicien aspirateur que laisser traîner ses affaires sans surveillance constitue un délit passible de quelques centaines de dollars d’amende. Neuf dollars la navette pour se rendre au centre ville, les dortoirs d’auberge de jeunesse à 20$ la nuit, la demi-heure d’internet à 2$, des locaux un peu moins hospitaliers, faire les courses, sa gamelle, mettre un casque sur le vélo après 10 000km sans… pas de doute, l’Asie est loin derrière. Mais dans un sens, tant mieux puisqu’après une nuit à tenter l’impossible en appliquant de la glace sur un genou qui ne cessait de gonfler, il a fallu changer de crèmerie : l’hôpital de Cairns. Quitte à se faire opérer deux fois en 4 jours pour un petit saligaud de streptocoque sous la rotule, on préfère ne pas envisager la chose dans un mouroir du Laos ou chez le chaman papou. Et à 1300$ la nuit, l’assurance à 400€/an est largement rentabilisée.
La suite du programme étant programmée avec notre père et notre mère indignes (respectivement PI et MI dans les commentaires des articles), la période de convalescence n’allait au moins pas trop pénaliser les projets « boulot/pognon/se refaire la cerise ».
L’objectif prioritaire était alors de se rendre à Perth, tout à l’ouest, l’exact opposé de Cairns, là où le soleil brille et que le grisbi tombe un peu plus facilement qu’ailleurs. L’Australie pourrait être un continent, 6000 km à se farcir avant d’arriver à destination. Aussi nous décidions de raccourcir un peu le périple en van par un vol Cairns-Darwin.
Darwin, où nous entamons alors le périple durant lequel PI, MI et leur deux fils incapables se faisaient une joie de se retrouver après 16 mois d’absence. Et parce qu’en France notre famille est tellement dispersée dans un rayon de 100km à la ronde, un détour par le Litchfield National Park s’imposa pour y retrouver Charly et ses drôles de potes, le cousin maître ès crêpes et glanderies en tous genres depuis quelques semaines, qui ne nous fait toujours pas le plaisir de nous raconter son périple aux antipodes. Bref, vous lui pardonnerez comme vous pourrez ce manque de bravitude, notre petit séjour a été l’occasion de découvrir les merveilleuses créatures australiennes : les kangourous décapités, les vaches gonflées au bord de la route, les sauriens qui n’ont pas voulu pointer le bout de leur nez, les termitières de 5m, les perruches par milliers, les grenouilles cachées sous la lunette des WC, les bed bugs et les serpents venimeux, mortels en 30 minutes quand l’hôpital le plus proche est à 40. Tout ça est un peu gros pour la seule rubrique des chiens écrasés.
Une entrée en matière prometteuse, vite refroidie par les étendues désertiques interminables qu’on a du avaler par la suite. En cherchant bien, il doit même nous rester des grains de sable entre les incisives. Et puis, j’ai tenté de tourner ça dans tous les sens mais il faut bien l’admettre, traverser le désert a été d’un ennuuuuiiiiiiiiiii…. pfiuuuuu! J’ai donc décidé de vous épargner ça en citant Théodore Monod, alias le promeneur ou le marcheur du désert (père indigne me corrigera) : « Parler du désert, ne serait-ce pas d’abord se taire, comme lui? »
Voilà, donc si on vous demande…
Ce que nous retiendrons principalement de cette partie du voyage sont en fait les parties d’échecs à l’arrière du van (en rattrapant les pièces volantes dues aux écarts du conducteur), et les soirées de coinche épiques.
L’horizon s’éclaircissait alors que nous quittions Port Hedland, ville industrielle sur laquelle nous aurons l’occasion de revenir dans un prochain article, et que nous entrions dans le Karijini National Park. Le parc national du Karijini, pour les non anglophones (Ouh qu’il est taquin!). Après 3000 bornes, voici un peu de changement. Du relief pour commencer : une gorge imposante dont on peut parcourir le lit asséché. Vous savez, le genre d’endroit où la cavalerie aime bien se faire bloquer par un gros caillou poussé par les Apaches dans Lucky Luke.
Suite à cela, il fallait reprendre un peu de Théodore Monod au dessert avant d’arriver à Exmouth pour une activité un peu moins aride : la plongée. Après avoir bêtement raté les récifs coralliens en Indonésie notamment, puis à Cairns, nous voici tout de masques et tubas vêtus, prêts à admirer goujons et carpes d’Australie dans leur environnement. Pour illustrer l’article, quelques photos aquatiques de Némo, ses amis et leur immense garde-manger seraient les bienvenues mais c’est mère qui les a toutes ramenées sans dire un mot (voyez à quel niveau d’indignation nous tombons là).
Nous entamons alors la descente sur Perth, encore près de 1500km mine de rien. Un dernier petit arrêt plongée pour rentabiliser le matériel, une plage de coquillages, une ville construite avec ces même coquillages, une tentative malheureuse d’apercevoir un eu plus qu’un petit aileron de requin et puis les « blow holes » et les « pinnacles. »
Les blow holes sont des trous naturellement formés dans la roche par l’action de l’eau. Ainsi, à chaque fois qu’une vague vient percuter la côte, un immense geyser s’élève au-dessus de nos têtes. Et si on s’aventure un peu au bord (toujours au sec, pas folle la guêpe), on est rapidement entouré par d’immenses vagues. Joli spectacle.
Pour continuer avec des références aux BD, on pourrait croire qu’Obélix est venu poser ses menhirs un peu plus loin qu’en Bretagne, au Pinnacles desert. Sur place, des milliers de concrétions rocheuses calcaires pouvant atteindre plusieurs mètres ont émergé du sable dans un spectacle étonnant. Et les perruches s’en mêlent pour notre plus grand plaisir.
Juste en-dessous, Perth s’élève, la première grande ville de notre parcours et notre point de chute pour tous les quatre. Une journée à flâner dans le parc qui surplombe la ville, puis les parents s’envolent alors vers leur escale d’Hong Kong et nous nous établissons à Northbridge, le quartier asiatique de la ville. Débute alors une partie un peu moins trépidante de notre voyage, anticipée mais redoutée depuis des mois : le… le… le… travail! Merde, c’est quoi ce mot là! Après 16 mois sans bosser et des images plein la caboche, la reprise ne va pas être facile, malgré la possibilité de gagner beaucoup plus qu’en France.
Qui a dit que l’Asie nous manquait déjà?