Vous m’excuserez pour l’originalité du titre, j’ai rien trouvé. Au moins, c’est clair.
Nous nous étions donc quittés là :
Ma journée de repos de Mae La Noi ne m’aura finalement pas décidé à abandonner mon idée de stop. Et dans un pays où ça marche si bien, ce serait con de s’en priver. Après 40nouveaux kilomètres de hauts et de bas, pour changer, je m’arrête donc au bord de la route et commence à chercher un coin pour me soulager. Je ne tomberai pas dans les détails scabreux malgré le récent succès des contes scatophiles d’Alexandre, et ce d’autant plus qu’on ne m’aura pas laissé le temps d’ouvrir ma braguette. À peine ai-je débuté mes investigations qu’un pick-up s’arrête pour me demander où je voulais aller. « À Chiang Mai? Montez! » Simple non? Les dénivelés se succédant sans laisser place aux habituels superbes points de vue en haut des cols, je ne regrettais pas ma décision.
La nuit est tombée quand mon chauffeur me dépose à la station de bus et je ne reconnais rien de la ville où nous avions déjà passé quelques jours. Si bien qu’après avoir trouvé les remparts de la vieille ville, j’en fais le tour complet pour finalement me rendre compte que j’étais arrivé au bon endroit du départ. Quinze kilomètres gratos, cadeau de la maison et j’atterris dans une Guest House tenue par des Japonais qui ne parlent ni anglais, ni thai. Ben ça doit être pratique ça tiens!
Lendemain, départ matinale à midi, comme tous les jours. Je prends la route après une soupe de nouille et une canette d’Ice Tea qui n’avait sans doute pas vu le jour depuis quelques années. Objectif approximatif : la moitié du chemin jusqu’à Chiang Rai, avec un gros R à la place du M, la prochaine grosse ville.
Mais rapidement je me mets en tête de rallier Chiang Rai le soir même et je vous la fais plus courte que le coup du demi-sel : j’arrive après 200km, 9h sur le vélo dont 4 de nuit et je tiens grâce à mon régime très stricte composé de beaucoup de fruits secs et d’un maximum d’eau.
Non je rigole, ça c’est ce que tout les bons samaritains nous conseillaient en partant. Moi je tourne Pepsi, Mentos, Chupa Chups depuis mes 350km, et je roule en plein caniar (sans compter tous les départs de lendemain de bringue). On change pas une équipe qui gagne et ça pue moins la déprime que les fruits secs bien pensants et les levés aux aurores. Je pense pouvoir bientôt concourir pour le titre du sportif à l’hygiène de vie la plus dégueulasse. Manque peut être un peu de schnouf non?
Chiang Rai donc, ville plutôt sympa avec ses deux principales attractions, le temple blanc (Wat Rong Khun) et la Black House, situés respectivement à 13km au sud et au nord du centre.
Le Wat Rong Khun a été érigé en l’honneur de Rama IX, l’actuel roi de Thaïlande et certaines parties sont encore en construction à l’heure actuelle. Je vous laisse admirer la belle bâtisse sur ces quelques photos, et fais l’impasse sur tous les détails puisque le plus intéressant se trouvait à deux pas d’ici, caché derrière un grand portrait de Sa Majesté.
Wiki : En rupture avec la plupart des autres temples, celui-ci est d’une blancheur extraordinaire, pour symboliser la pureté du bouddhisme, et incrusté de morceaux de miroir pour suggérer la réflexion de l’illumination. Pour y arriver, vous devrez passer entre deux crocs géants et un lac parsemé de créatures des enfers. C’est une des constructions les plus étranges conçue par l’homme.
Wiki : Il devait être achevé en 2008, mais n’est pas encore terminé. L’ensemble comprendra 9 bâtiments, qui constitueront la vision du paradis bouddhiste sur terre telle qu’imaginée par l’artiste.
Vous allez me dire, c’est une marotte chez toi! Eh bien, sachez que je prends effectivement bien d’avantage de plaisir à me mêler aux locaux pour un combat de coqs que d’aller visiter le 3546ème temple de Thaïlande (même si celui-ci est très joli et vaut le déplacement, il faut l’admettre) encerclé de 50 occidentaux armés jusqu’aux dents de l’appareil le plus gros et le plus cher possible tout en ne sachant pas s’en servir.
Combat de coqs donc. Encore. Mais en plus pro. Il s’agissait de l’entraînement des coqs qui vont ensuite montrer tout leur talent au Stadium le samedi soir. Et ce qui frappe en arrivant, c’est qu’on a pas affaire à des pédés (c’est pour les requêtes google. Mourinho ayant fait scandale en disant « pédés » récemment, si je le case 2-3 fois dans l’article, on peut avoir des résultats). Ces coqs disions nous, sont de sacrés bestiaux, on sent le changement de catégorie. La préparation est également plus soignée, le cadre un poil plus officiel, les combattants choisis avec soin avant chaque session. Non y a rien à dire, on est passé de Geoffroy Guichard au Nou Camp.
Grâce à leur anglais de l’impossible et mon thai a tomber, j’arrive à comprendre les quelques règles de base : les combats durent 20 minutes et ne sont pas à mort (contrairement au sud du pays apparemment, désolé Diana). La « morsure » à la crête semble également interdite, du moins à l’entraînement. Ça va, vous suivez?
Après toilette on ne peut plus complète (pour éviter les blessures me disent-ils…???), nos deux challengers sont placés face à face dans l’arène et… la suite en images!
La bagarre se termine alors comme elle a commencé : toilettage intensif.
La transition avec cet intermède animal est toute trouvée avec la visite de la Black House. Quelques indications assez précises glanées sur le net pour s’y rendre et… je ne trouve pas. Il me faudra encore l’aide d’un local parlant anglais et un peu de chance pour y arriver. C’est bien simple, rien n’est indiqué et c’est au bout de plusieurs ruelles ridicules.
Une transition toute trouvée disais-je, car outre les bâtiments à dominance noire comme vous l’aviez subtilement deviné, le design intérieur est composé quasiment exclusivement d’animaux morts : peaux, fourrures, os, crânes, squelettes entiers, cornes, défenses, coquillages. Un petit paradis pour notre Brigitte nationale. Enfin, comme vous savez que je ne me lancerai sûrement pas dans une diatribe sur la chasse et l’extinction des espèces, je laisse aux curieux le soin d’admirer ce travail d’artiste que j’ai beaucoup apprécié. C’est original et esthétiquement souvent réussi malgré le fouillis.
De retour sur mon vélo, puisqu’il s’agit tout de même de rejoindre la prochaine ville, Mae Sai, je décide de suivre le panneau « Karen Long Neck » sans trop me faire d’illusions sur ce que je pourrais trouver. Je longe alors des rizières à perte de vue pour atteindre un parking que j’espérais ne pas voir :
Cette photo sera donc la seule que je prendrais avant de faire demi-tour sans même apercevoir un seul villageois. J’avais déjà lu que les villages de femmes au long cou étaient pour la plupart envahis de touristes, j’ai bêtement suivi l’indication avec l’espoir de trouver un coin sauf des tours organisés et des minibus.
Tout ceci ne m’avance guère dans mon périple et je dois encore rouler quelques 60kms. Seulement les tentations sont grandes en chemin et je dois tout de même faire halte pour savoir pourquoi ce restaurant s’appelle « Cabbages and condoms ».
Qu’est-ce qu’on y fait, qu’est-ce qu’on y mange, qui travaille là-dedans? C’est en fait un restaurant tout ce qu’il y a de plus normal, l’explication sur le menu indique que le propriétaire incite via son restaurant au port de la capote. Très bien, très bien. J’attendais quand même quelque chose de plus funky. La dernière phrase du menu fait sourire :
Une de fois de plus, j’atteins la ville de nuit et m’arrête dans le premier resto venu, le Kik Kok. Deux occidentaux et une Thai viennent à ma table et après discussion des prix, m’emmènent dans leur GH à 150baths la nuit. Le soir je parle longuement avec l’Américain qui vit depuis 12 ans en Thaïlande. Il m’avoue ne pas savoir, alors qu’il parle et comprend correctement le thai, pourquoi certains ne comprennent pas quand il commande un plat par exemple. OK, il y a différents tons, mais faut pas déconner, y a pas besoin de répéter 3 fois Khao Pat au resto pour comprendre qu’on veut un plat de riz… De même qu’inverser le mot et son adjectif provoque des blocages insurmontables…
Le lendemain matin (enfin, de 11h à midi), visite de Mae Sai, son perpétuel marché aux ruelles couvertes, le pont de la frontière birmane et la colline et son scorpion géant faisant face à… la Birmanie. Quelle surprise. Ils n’ont plus qu’à placer une grosse mygale côté birman et on se croira dans Chérie j’ai rétréci les gosses.
Direction désormais : le triangle d’or, autrefois célèbre plaque tournante du trafic d’opium, et qui n’est plus qu’un point sur la carte d’où l’on peut voir la Birmanie et le Laos juste séparés par le Mékong et un de ses affluents, tout en ayant les pieds sur le sable thaïlandais. Disons que c’est un endroit incontournable, symbolique de la région qui ne laisse cependant pas bouche-bée.
Il est encore relativement tôt dans l’après-midi, je ne dors donc pas sur place comme prévu et poursuis ma route jusqu’à Chiang Khong où j’arrive… de nuit. Vous commencez à comprendre. Ce n’était cette fois pas tout à fait prévu mais la route recommençait à déconner à pleine montée. Rien d’impossible mais suffisant pour mettre une ou deux heures dans la vue et trois litres de sueurs dans mon caleçon. En ville, chambre à 150baths, je prends encore.
Départ le lendemain pour Phu Chi Fa où il faut paraît-il se rendre pour admirer le lever du soleil. J’y vais donc. Premières soixante bornes les doigts dans le nez pendant lesquelles on m’offre deux shots de whisky, les trente dernières le nez dans les doigts pendant lesquelles j’ai tout le temps de regretter les deux shots. De la bonne montée style piste noire à Courchevel mais sans télésiège. Je laisse derrière moi quelques décilitres de sueur et je peine parfois à maintenir le guidon au sol à cause des 25-30kg que je traîne. Je peux au moins profiter du coucher de soleil en haut des cols, la bouche et les yeux pleins de sel en pensant qu’il me faudrait encore 5h à ce rythme.
Je finis par atteindre un col dont le nom aurait du me rappeler quelque chose : c’était Doi Pha Tang, le point culminant de la région. Avec un peu plus de lucidité j’en serais resté là en voyant le panneau « Phu Chi Fa 25 ». Merde, j’en ai fait que 5 là? Sept après vérification du compteur… bah me v’là chouette! La nuit tombe, je peux désormais deviner les dénivelés au loin grâce aux phares des rares deux roues. Heureusement, les pourcentages se calment un peu et je m’offre quelques moments de répit. J’arrive au village indiqué « Phuc Hee Fa » à plus de 21h avec une dernière surprise : tout est fermé, j’ai faim et je dois pousser mon vélo dans la pente à 40% du bled. Je dois finalement me résoudre à prendre la chambre à 300 baths où ils servent encore à manger. Bon ils déconnent pas, j’avais 8 lits pour moi!
Réveil 5h30, je me fais embarquer dans un pick-up avec quelques autres touristes Thai venus pour la même raison que moi, encore 400m à pattes et nous attendons à une grosse dizaine au-dessus des pics. Le soleil vient… dommage, c’est brumeux, il faut attendre encore 2h pour en profiter un maximum. Mais tout le monde s’en va après 10 minutes et je reste seul en haut en pensant qu’ils feraient les 2km à descendre sans moi.
Mais non, ils m’attendent et klaxonnent! Rhooo les cons, 1h de voyage en groupe et ça me gonfle déjà. Je descends… ils sont partis. Bon allez, petit dej’ et je me casse. Le début n’est pas de tout repos, retour à Pha Tang où je découvre que c’est un village chinois aux prix de Shanghai. Je ne m’étonnes plus de voir des femmes porter de grosses charges sur leur dos. Typique de la connerie chinoise de ne pas exploiter l’invention déjà six fois millénaire de la roue.
Sur la route je croise un couple de Québécois se rendant à Phu Chi Fa le lendemain. Ils viennent de commencer leur tour à vélo. Bon courage! De retour à Chiang Khong j’ai juste le temps de trouver le passage frontière laotien. Un coup de tampon de sortie, un petit bateau à moteur, un visa à 31 dollars sans date de sortie indiquée. Hop, me revoilà au Laos!